CHEMIN QUI ME SUIT
Jean-François MATHÉ
EDITEUR : ROUGERIE
ISBN :978-2-85668-169-5
ANNÉE :Décembre 2011
PAGES : 112
Prix : 14 €
Jean-François Mathé est l’auteur d’une œuvre poétique éditée principalement aux éditions Rougerie. Une quinzaine de livres parus entre 1971 et 2011 dont certains furent primés. Contractions supplémentaires du cœur reçu le Prix Antonin Artaud en 1988 et le Prix Kowalski fut attribué à Le Ciel passant en 2002.
Ce livre Chemin qui me suit rassemble le recueil éponyme inédit et des Poèmes choisis dans cinq précédents livres parus entre 1987 et 2007. L’auteur a souhaité par « souci d’unité » rassembler des extraits de ces livres qui marquent de pour lui la maturité de sa poésie.
Assurément, par l’expression d’une voix intérieure pressante, c’est un langage propre au poète qui se dégage de la lecture de ce livre. Les mots dans l’agencement de la langue, proses ou vers, suscitent en moi comme une urgence à la lecture des poèmes. Peut-être l’urgence du temps qui passe que l’on ressent ? Proses, vers libres ou versifiés Jean-François Mathé utilise diverses formes de l’écriture pour servir sa poésie. Même si comme à mon habitude les poèmes en vers me laissent toujours sur l’impression que la sonorité recherchée subtilise au poème l'invention, le singulier, l’éclat d’une émotion…Il est de nombreux vers ici qui me démentiront, Nous avançons sans rien défaire/ de la jeunesse que nous eûmes/mêmes désirs malgré la brume/ qui nous dérobe des lumières. P 37.
L’amoindrissement des lumières et de ses horizons, voilà sans doute la matière de ce livre. Tout semble écrit et rassemblés dans ces pages par une volonté de remémoration. Mémoire de ce chemin que l’on trace et qui perdure dans sa quête et ses doutes, avec ces averses de mots qui reflètent une réalité sentie au cœur de la chair. Toute une vie dans une mémoire en équilibre. Équilibre du cœur, d’où jaillissent les mots avec leurs traînes, de souvenirs, de rêves anciens, de nostalgie de tout ce qui fut fêté « vivant ! ». personne d’autre que toi ne porte la lourde étoffe du deuil p47. Le livre conserve ces sentiments de vie dans les poèmes, que nul temps n’abolira.
Dans le livre on perçoit le regard du poète qui se retourne vers le passé mais aussi qui surveille l’avenir en ne cessant jamais de mesurer la distance qui sépare de l’horizon dernier. maintenant / dès que le soleil décline/ Je m’arrête pour vérifier / si c’est mon ombre qui grandit / ou moi qui rapetisse. p 53
C’est l’ombre souvent ou la brume, celle qui cache et qui clôt l’horizon, qui emplissent les poèmes depuis les premiers temps, tels un viatique sur le chemin que trace le poète. Très tôt semble-t-il, le poète a ressenti l’ombre de la disparition. il n’y a pas de trace / tu fus enfant le temps d’un rire / aussitôt tu as entendu l’automne/ en faire un ricanement / de feuille sèches .p 59
Le vent, les arbres, les oiseaux, le ciel et les jardins, l’ombre de l’homme, tous ces éléments peuplent les poèmes. Mais ils n’existent vraiment qu’à l’aune d’un temps qui passe et qui annonce le terme d’un voyage. En s’ouvrant, la porte arrachera d’un coup / l’ombre qui avait pris ses habitudes p 79
En filigrane, c’est la disparition des êtres qui hantent les poèmes du livre. La mort de ces autres qui nous ont côtoyés, celle du poète lui-même, celles de ceux que l’on aime et que l’on a aimés. Je n’avais pas vu la limite / au-delà de laquelle ceux qui me devançaient/ ou me côtoyaient / ne me voyaient que de dos.
Ce Chemin qui me suit, c’est celui qui a lien avec les verbes tracer et être. Chemin construit en cheminant que l’on suit et qui à la fois précède, tant le poète comme les hommes en connaissent l’issue. Chemin d’écriture et chemin de vie se superposent. Les traces demeurent dans les vers, les proses, la poésie comme autant de signes de cette vie et de la présence au monde du poète. Mais malgré les menaces qui demeurent : qui saurait arrêter ceux qui vont / d’ombre en ombre au-dedans d’eux-mêmes/.p17
hm