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Poèmes ou comment je me suis inquiété de la suite à donner à cela, ALIN ANSEEUW

Poèmes ou comment je me suis inquiété de la suite à donner à cela,

Alin Anseeuw,

Propos2 Editions,

Manosque, non paginé, 

12 €.

par Jean-Paul Gavard-Perret

 

Ode à la vie

 

Comment qualifier le texte d’Alin Anseeuw sans le ranger sous le registre de l’ode ? La forme même y engage puisque chacune des strophes-pages (du moins la plupart) commence par  la préposition « à ». Elle précise à qui ou à quoi s’adresse cette poésie rare et multiple en ses injonctions et ses structures narratives » ou les temps se mêlent. L’auteur y invente « une forme / moderne pour me trouver dans l’exposition / à la trouvaille comme si / d’autres corps dans cette fable / ou dans l’oreille » venaient partager ses motions. À ce titre les divers sens sont sollicités  par l’écriture : visuel, sonore, kinesthésique afin que les mouvements poétiques repoussent la raison dans les bords du monde.

Paradoxalement et sous effet d’élargissement de l’espace Anseeuw permet au lecteur de rentrer en soi, de s’y retrouver non dans le leurre et la dispersion de l’immensité mais dans une succession d’espaces précis : la grammaire d’Apollinaire par exemple segmente la turbulence froide des astres. Quant à la brillante chaleur des foins elle permet de réinventer la possibilité de flirter.

Loin de toute nostalgie le poète propose une écriture aussi limpide que complexe où se perçoit toujours un mystérieux tremblement dans des vers blancs, irréguliers. Loin d’une pure métrique rationnelle ils rendent sensible des poids ou des légèretés qui nous sont parfois devenus étrangers. Existent là, la gravitation de l’espace, l’avancée dans des forêts - mais pas seulement des songes - tantôt touffues tantôt déboisées. Le poète y envisage des diagonales du fou. Elles déplacent bien des lignes.

Toute une pulvérisation de l’intime prend forme dans une œuvre qui s’acharne - et réussit - à dire l’insaisissabilité,  lot de tout vrai poète. Elle représente ici son souffle. Anseeuw par sa langue en devient le transfuge – sans arrogance ou excès. S’y croisent des images du monde où reviennent des émotions perdues. Celles par exemple éprouvées à la vue d’  « A nos amours » de Pialat ou à la lecture des « Souvenirs d’un mangeur d’opium anglais »  ou encore, celles ressenties lorsqu’une femme aimée « se déshabille deux fois » dans un trou de soleil.

JPGP

 

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