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  • La Revue Incertain Regard au format numérique

    Un numéro 0 de la revue Incertain Regard au format numérique paraîtra vers novembre 2009. Sous la forme d'un livre électronique les numéros paraîtront semestriellement. Incertain Regard édite de la poésie exclusivement. Vous pouvez nous faire parvenir un minimum de 4  à une dizaines de textes, inédits de préférence. En suivant ce lien

    http://www.incertainregard.fr/PageLaRevue.htm

    vous trouverez les informations pour nous faire parvenir vos textes.

    Cordialement

    Hervé Martin

  • 40 POÈTES POUR TARDIEU

    POETES TARDIEU.jpgFrédérique Martin-Scherrer

     

     

     

    Éditions Calliopées

     

     

    N° ISBN : 978-2-916608-13-6

    Date de parution : fèv 2009

    Nbre Pages :      105        

     

     

    À, sur ou à partir de Jean Tardieu, c’est l’unique consigne à laquelle devaient se tenir les auteurs qui avaient reçu de Frédérique Martin-Scherrer cet appel à la contribution de textes autour de Jean Tardieu. Tandis que le Printemps des Poètes 2009 célébrait Tardieu, l’occasion était belle de vouloir rassembler des contributions dans un livre afin d’estimer ce que représente son œuvre pour les poètes d’aujourd’hui. Textes, lettres, poèmes sont donc rassemblées dans ce numéro un des Cahiers Jean Tardieu, qui est publié aux éditions Calliopées. Cette publication remplace T.R.P. (pour textes, recherche et diffusion) et poursuit le travail entrepris autour de l’œuvre du poète par l’association Jean Tardieu, présidée par Serge Gobert.

     

    Les contributions des poètes rendent hommage, chacun à leur manière, à Jean Tardieu. C’est une lettre, un poème, un texte de souvenirs ou une réflexion qui font écho à l’œuvre. Parfois même, dans une forme à la Tardieu qui évoque les mots, un livre ou la vie de ce Monsieur Jean dont Jean-Baptiste Para semble dans son texte décrire l’univers. Autant de créations différentes qui éclairent sous les auspices de l’amitié (André Balthazar, Philippe Jaccottet, Jean Pérol…), de la reconnaissance (Max Alhau, Jean-Luc Maxence…) ou de l’humour (Luis Mizon, Jean-Pierre Verheggen…) l’univers et l’œuvre de Jean Tardieu. L’énigmatique est également présent avec le texte d’Annie Cohen au titre renvoyant au livre Le professeur Frœppel et au mur des lamentations… Un texte elliptique, allégorique usant du jeu de reflets et d’images. Béatrice Libert et Christophe Manon répondent, à la manière de, l’une avec des énoncés poétiques et drôles, le second de façon plus symbolique, avec un dessin géométrique noir et blanc comme labyrinthique, quand Jean-Luc Parant et Jacques Demarcq explorent l’univers de Tardieu y mêlant la singularité de leur écriture,  usant d’une méthode d’appropriation riche et sentie.

     

    Il faut lire ou relire Jean Tardieu, dans tous les registres allant de l’humour à la gravité, dans l’équivoque, dans les multiples sens qui émanent de ses livres : Monsieur, Monsieur, Le Professeur Frœppel, Le Fleuve caché, Une voix sans personne, Comme ceci comme cela… Car c’est bien là le rôle d’une œuvre, celui ne pouvoir être circonscrite par des limites qui l’enfermeraient. Une œuvre est intarissable et son questionnement à jamais inachevé, et c’est je crois ce que nous a laissé Jean Tardieu. Peut-être convient-il de refermer le livre sur le texte d’André Balthazar qui nous rapporte une anecdote, où parmi les reflets et les ombres émanant de l’œuvre, Jean Tardieu,   intérieurement tout remué,     encore sous le coup d’une émotion, nous apparaît comme présent.

     

    HM

     

     

  • CLAMEURS NOMADES

    Francesca Y. Caroutch

     

    Éditions du Cygne.

     

    ISBN : 978-2-84924-139-4

    13 x 20 cm

    92 pages

    12,00 €

    La poésie de Francesca Y. Caroutch permet la jonction de l'altitude la plus vertigineuse avec le corps dans ce qu'il a de plus temporel, d'instantané et de tellurique donc de plus abyssal. C'est à travers lui que la poétesse donne le point d'appui et de référence à l'incommensurable. Ne nous y trompons donc pas : chez elle la métaphysique ne vient pas d'en haut mais d'en bas. Du ras de la conscience voire même de dessous la peau de l'inconscient.

     

    Mais cette métaphysique (fruit - qui sait ? - d'un manque de la jouissance liée à l'amour et la connaissance) demeurerait naïve et sourde si elle ne passait pas par le filtre de la conscience. Toutefois il ne s'agit pas de transformer la bête en ange mais simplement d'ouvrir une nouvelle dimension à la jouissance. Écoutons l'auteur :

    “Les plaisirs des sens

    auxquels on ne s'attache pas

    Sont des alliés de l'éveil” (p. 41).

    Tout est là. C'est le moyen de sceller l'homme à l'univers dans une dimension essentielle.

     

    À travers une poésie se mêlent à des fragments de mémoire, de réelles visions inspirées souvent par des espaces italiens. Ils contrastent avec le motif intime - lieu clos où s’absorbe sa vie et s’accomplit son œuvre. Francesca Y. Caroutch donne à la nature humaine l'effusion du nombre. Tout dans son livre est en mouvance vers le "signal" :

    "éclair bleu dans la faïence de l'été" (p. 30).

    Au sein de la rencontre d’images chères à l’artiste naît une création originale qui ne dissimule pas une propension à dévoiler une intimité. Cependant on est bien loin de ces évocations "domestiques" où s’éprouve une sociabilité apaisante ou encore une attention portée aux images furtives du paradis d’enfance.

     

    Chez la poétesse ce qui est retenu appartient à des moments de vie. Ils s’épanouissent à contretemps. Comme si c’était la marge, le bord des choses, quelque part entre solitude et liberté qui comptaient. On est loin d'un panthéisme béat, d’une recherche d’un bonheur perdu. On revient à la source même de l'écriture, de ses fissures. Car la poétesse cède parfois à la brisure contre l'intégrité de l'étendue même si c'est bien cette dernière qui est recherchée. En conséquence ce qui devient saisissant d’un point de vue poétique, est précisément le paradoxe d’une écriture vouée de livre en livre à communiquer une véritable phénoménologie cachée de la vie dans ce qu'elle a de plus intime et de plus large aussi.

     

    Tout lecteur des sublimes "Clameurs nomades" se trouve confronté à l’apparente clarté structurelle de ses fragments inspirés largement par l’épreuve de la nature, du temps ou de choses vues ou plutôt ressentie au plus profond de l’expérience intérieure. Une configuration minimale s’impose alors, identifiable dès la première lecture et bientôt récursive d’un fragment à l’autre. Dès lors surgit

    "Dans ce chaudron sans fond

    l'enfer des miracles"(p. 31)

    La sensation n'est plus proustienne. Elle devient le médium privilégié par lequel s’opère la révélation. Celle-ci ne se contente plus de ressusciter ou de ressasser les traits du passé. La mise en perspective est beaucoup plus intéressante et porte l'écriture loin des sentiers battus. Derrière les fragments qui s’enchaînent sur le mode disjonctif une autre "scénarisation" prend racine et pose la question d’un effet diégétique global : tout participe à l’élaboration progressive d’un espace alternatif qui permet au lecteur d'être renvoyé à sa propre expérience du monde.

     

    Nous sommes donc loin des longues intercessions qui peuvent accompagner dans la poésie l’expression du sentiment intime lorsqu'il est par trop narcissique. Aucun détour, aucune spéculation formelle ne préludent à notre entrée de plain-pied dans cette intériorité annoncée comme telle mais dont le but n’est pas de raconter un « moi ». L'ensemble crée un parcours atypique et un étrange discours sur un poème fantôme dont la ligne de fuite ultime, rescapée lointaine de l’éboulis initial, renvoie l’espérance habitable au cœur de tout lecteur quand le discours s’achève. Cette détermination du foyer de l’expérience d'écriture résulte d’un choix plus que stylistique : vital. Il refuse toute neutralité au profit d'un engagement intime essentiel puisque chez Francesca Y. Caroutch l'intime n'est pas de l'ordre de l'événement il est de l'ordre de l'écriture, de son avènement.

                                                                                      

     

    Jean-Paul Gavard-Perret