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  • L’EAU – L’ALENTOUR – L’EAU

     

     Christophe Lamiot Enos,

    Éditions Passage D’Encres, Romainville,

    coll. Trace(s),

    110 pages,

    15 euros.

     

    PRÉCIEUX - TROP PEUT-ÊTRE


    Dans ce qui se présente en sous-titre comme « journal de cinq journées en juillet vers et sur Sifnos », l’extrême précision descriptive et narrative transforme le réel en une sorte de forêt des signes propre à suggérer une sensorialité primale. Sous forme de poème d’amour, Lamiot-Enos tente aussi de transformer le monde dans sa trivialité positive :

    « Je m’approche, de la boule, tant

    Que, maintenant, mon regard sans faute

    Si. Il s’agit de polystyrène

    Échoué ici ».

    Mais cette transformation ne va pas sans complaisance stylistique, sans afféterie. Elle fait par exemple de la mer une prêteuse de jupe froncée.

     

    La préciosité est la marque du livre. Elle ne trouve pas toujours sa juste ligne. Et le poète hésite parfois jusque dans la composition des divers corpus et temps. Cela peut séduire. Mais agacer aussi. Une certaine subtilité complexe de la construction et des structures phrastiques ne semble pas forcément se justifier à tout coup. Pour une pépite, bien des formes précieuses presque ridicules.

     

    Se voulant image complice et trace vive de l'émoi sur la piste de cinq journées élues, la poésie piétine. Ses sensations ont bien du mal à franchir le seuil d’un réel flamboiement. Ne voulant rien laisser en souffrance, elles n’arrivent que trop rarement à faire ressentir une connivence intime avec un intérieur habité. Sa disposition à la curiosité du sens de la vie passe en partie à côté.

     

    On se doute que le poète veut faire ressentir de l’intériorité tout ce qui échappe habituellement au langage. Mais en devenant trop complexe le texte s’abîme. Et si on aime ce qui échappe au logos, les glissements de sens, la représentation qu’en propose l’artiste est d’une sidération surfaite. Elle devient pure spectacle pour le spectacle. Jeu pour le je. Bref, l’objectif du livre dévie de sa trajectoire. Au lieu de condensation surgit un aplatissement : le paysage devient une nature morte, le portrait de l’amour se dessine par défaut.

     

     

    Il est bien de casser le confort de lecture. Mais ici la technique débouche sur une sorte de déferlement postiche. Et du postiche au pastiche il n’y a qu’un pas. Reste un écart immense de l’écriture au natif. La parole en voulant s’ériger se couche trop souvent. Elle est écran. Elle reste technique addictive. Trop dans le spectacle un tel texte demeure  « littéraire » par son manque de matérialité. Le lecteur ne peut aller au-delà de certains effets. Il est privé  d’errance. Le spectacle visuel de Lamiot-Enos en cherchant la subjectivité la plus juste possible tombe dans une exploration qui pour le lecteur demeure de l’ordre du fictif, de l’illusion.

     

     

    Certes il faut saluer l’ambition de l’auteur. Mais sa méditation sent la vanité si bien que la vérité et la nécessité de livre se laissent trop rarement saisir. Au scandale possible succède un maniérisme. Le journal qui voudrait susciter une sorte de stupeur ne méduse que trop peu. Le livre demeure plus spectaculaire  que  fable humaine. Voulant inscrire la marge du monde, le bord des choses, quelque part entre solitude et liberté, il échoue dans une sorte de théâtralité. La détermination du foyer de l’expérience du livre semble résulter d’un choix plus stylistique que de la recherche d’un foyer vital qui refuserait toute neutralité au profit d'un engagement intime, essentiel, textuel… Même si c’est sans doute là l’ambition d’un poète qui n’a rien – malgré ce qu’on dit ici de son livre – de négligeable. Tant s’en faut.

     

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  • POUR LE REALYRISME - ROLAND NADAUS

    arealyrisme.jpgPour le réalyrisme

    Roland Nadaus

    Éditions Corps Puce - juin 2011

     

    Hésitant entre pamphlet et manifeste pour définir son texte écrit il y a 30 ans, Roland Nadaus emploie les deux formes qui se complètent dans le livre. Roland Nadaus se dresse d’abord ostensiblement contre les autocrates de la poésie et du verbe. Il s’érige contre des dictats qui imposeraient à la poésie des critères la réduisant à la seule textualité du langage et où elle ne serait traduite que par la forme et les valeurs intrinsèques de la lettre et du mot, niant de cette manière toute la sensibilité humaine. Le poète s’insurge contre cette vision exclusive d’une poésie réduite à la mécanique des mots au mépris de toutes autres diversités poétiques. Contestant ainsi Lautréamont, Roland Nadaus soutient que la poésie est amplement nourrie de la présence humaine par laquelle s’expriment le sensible et l’émotion des êtres.

    Avec un sens aigu de la formule et maniant l’invention et le néologisme dans un esprit critique et satirique Roland Nadaus désigne avec véhémence ces autocrates de la poésie contre lesquels il s’inscrit et cite ici le poète Denis Roche qui proclama, non sans une certaine provocation, que « la poésie est inadmissible d’ailleurs elle n’existe pas ». Puis argumentant son propos, il rappelle la mue en 1971 de Robert Lhoro en Lionel Ray en supposant pour le regretter que cette métamorphose fût inspirée par l’époque du moment, ou encore, évoque le quotidien Le Monde qui éditait des articles sur des textes d’une poésie hermétique, en omettant de proposer dans ses colonnes les échos de la diversité poétique qui existait aussi. Dans le même esprit il cite les revues TXT et Tel Quel.

    Puis, Roland Nadaus nous fait partager sa conception de la poésie.  Elle pourrait se résumer dans cette citation d’André Breton en page 75 du livre « Je veux que l’on se taise lorsque l’on cesse de ressentir ». C’est ici que le pamphlet semble faire place au manifeste. Pour Roland Nadaus, le même Lionel Ray en 1981  avec Le  corps obscur marque le passage d’une poésie axée sur la seule textualité du langage à celle qui englobe dès lors l’émotion et la parole humaine. Roland Nadaus la baptise réalyrisme. Construit avec les mots réalisme (le réel) et  lyrisme (le chant, la passion) ce réalyrisme propose un territoire pour le poème qui ferait place à une poésie liée au réel et à l’émotion vraie, sans être abscons ou s’épancher dans un excès du sentiment. Pourquoi en effet faudrait-il que la poésie  se situe ou d’un côté ou d’un autre ?  Quand on sait que c’est de l’émotion que naît le poème ! Émotion née de la rencontre d’un être sensible avec le monde, un être immergé dans la vie et confronté à des situations et des faits qui fondent le socle de son réel. La poésie est difficile à définir mais on sait qu’elle naît de cette rencontre ! Celle d’un être unique avec le monde dont le poète est le singulier témoin.  Avec  les deniers chapitres s’ouvrent des espaces lumineux où le Roland Nadaus parle avec sensibilité de la poésie. Il décrit avec justesse  la poésie du chant et du ressenti que l’homme habite avec son langage usé aux encoignures du monde. Langage forgé dans le creuset de l’expérience individuelle, du désir et de l’émotion. Avec Pour le réalyrisme Roland Nadaus défend une poésie habitée par  l’homme avec ses imperfections et sa grandeur. Une poésie « qui chante en avançant »  dans une « attitude à la fois humble et orgueilleuse ». Une poésie « à hauteur d’homme » !

    HM

     

  • LE DIT DES ELFES SYLPHES ONDINS ET AUTRES CREATURES

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     LE DIT DES ELFES SYLPHES  ONDINS ET AUTRES CREATURES

    de Silvaine Arabo

    vient de paraître chez Encres vives

    Numéro 479  de la collection Encres Blanches

    Format A4

    18 pages

    Prix : 6,10€

    Chez Michel Cosem 2 Allée des Allobroges 31770 Colomiers

     

     

    C’est un univers onirique et panthéiste que l’on découvrira dans ce court livre proche des contes de notre enfance et où les éléments de la nature prennent parole. Une parole en quête de beauté et de justice. Quand on connaît l'état du monde d'aujourd'hui, on comprend qu'il  y a urgence à plaider pour que le monde change. C'est du moins ce que j'entends dans ce texte qui pourrait être le livret d’un petit opéra avec ces prises de paroles successives, du marais, de la feuille, du vert, de l'ange... toutes entrecoupées de chœurs qui participent ensemble à l’invention d’un monde. Le texte semble dire qu'il ne faut pas perdre espoir et qu'il faut considérer la nature à travers tous les éléments qui la composent, si l'homme ne veut pas perdre l'essence même de la sienne.

    HM