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james sacré

  • PORTRAIT DU PERE EN TRAVERS DU TEMPS - JAMES SACRE - DJAMEL MESKACHE

    James Sacré – Djamel Meskache

    Éditions La Dragonne

     

    18 €

    Mai 2009

     

    Ce livre est le troisième de la collection Carrée des Éditions La dragonne. Il est conçu comme le lieu de rencontre d'un poète et d'un plasticien. Des lithographies de Djamel Meskache accompagnent les poèmes de James Sacré comme autant de signes de l’amitié qui les lie. Des lithographies lavis où des rouges, des jaunes, des bleus cohabitent avec des noirs en des formes pouvant suggérer des fleurs en bouquets. Une collaboration étroite quand un poème est dédié à Djamel Meskache dans ce livre qui approche un portrait du père et dit son manque. Djamel Meskache est aussi poète et éditeur des éditions Tarabuste. 

    Ici, la langue est simple dans des mots de tous les jours. Et ce qui fait la beauté du livre, c’est le langage, l’articulation des mots. Une langue mélangeant en elle passé et présent, plaisirs et défaites, souvenirs et projets. Cela forme comme des strates de matières composant des territoires intimes, que pourraient interroger des archéologues du langage « Où des poèmes font bruit d’une improbable langue ? ».  Une intimité se révèle qui traverse l’universel humain : « Il n’y a pas que mon père / D’autres sont là / Le tien lecteur… »

     

    Comment parler de ces poèmes écrits entre mars 2001 et avril 2008 tant ils procèdent par touches, dessinant les contours, recadrant en regards multiples ces portraits approchant le visage, l’existence du père. On ne sait si les autres - morts - dont il est question  sont là comme autant de signes rappelant l’absence du père ou si ces poèmes cernent aussi le visage de la mort qui efface les corps des tous êtres aimés. Il y a dans une proximité à la mort du père, celle d’une tante puis d’une autre, puis d’autres morts encore, qui font échos à la perte dans la douleur recommencée, la remémoration de l’absence. Le visage du père - son absence – réapparaît en superposition  à l’occasion d’une scène, d’un fait, d’une information nouvelle... Il en va ainsi avec la couleur bleue de la bouillie bordelaise, la simplicité d’une émission de radio, une route d’Arizona ou la ville de Vitré... Tout ici est prétexte, inconscient, à rappeler la figure du père.

    Mais écrire ne peut rien, la poésie n’y peut rien changer. Pourtant, les tentatives de la poésie à ré-susciter le père, son visage, malgré son absence et la réalité de la tombe ne sont pas entièrement vaines. « Quoi donc est vivant / dans ces mots que voilà écrits ? À peu que je voudrais pleurer. » écrit James Sacré.

    Ce qui est vivant ?  C’est sans doute ce qui s’échappe de ces poèmes. Ces éclats de beautés, leurs prégnances qui enserrent parfois la poitrine du lecteur. Ce qui est vivant ? C’est le commun lieu de cette humanité qui nous fonde entier, et nous assemble pour nous désigner tous femmes et hommes face à la vie.

     

    HM

  • EN TIRANT SUR LES MOTS

    James Sacré

    Éditions Potentille

     

    7 €

    2 ième Trim 2010

     

    Refermée l’ultime  page du livre, achevé le dernier poème, quelque chose de curieux se produit. J’ai le sentiment de trouver dans ce livre un peu de moi-même. C’est souvent le fait d’un bel ouvrage de poésie qui lie le singulier au collectif. Et en le refermant, j’ai le geste de presser le livre contre moi, tout en serrant de mes doigts l’épaisseur de ses pages comme pour tenter de saisir, je ne sais… ce sentiment qui s’en échappe et me rattrape. La poésie est affaire du corps.

     

    Un sentiment alors que j’interroge et creuse. Cette impression confuse d’une beauté jaillie de la lecture. Beauté qui me fait signe par l’évocation du père et par la simplicité  – apparente –   d’un parler recréé qui me fait songer à celui de paysans, ces gens de terre. La poésie est-elle comme un travail de la terre ?

    Et la forme de cette écriture, non dans son apparence sur la page mais dans la structure du langage me touche, comme bouleversée soudain par l’émotion, jamais loin, qui se glisse dans le vers. Vers langagier et chaotique qui tracent comme des labours préparant des récoltes d’une saison prochaine. Qu’est-ce donc la poésie ? L’importante bibliographie de James Sacré n’a pas épuisé la question. D’où provient ce plaisir, ce désir d’écrire des vers ? James Sacré le recherche sans bien réussir à le préciser. Et c’est tant mieux au fond ! Car c’est bien par cette quête que nous trouvons nous aussi, notre plaisir de lire.

     

    À moins, que ce plaisir suscité ne se loge subtilement dans la forme de cette écriture ? Lorsqu’elle recrée ici une langue,    ce langage qui est comme –chahutant la syntaxe pour évoquer à mes sens ce parler entendu dans l’enfance. Celui des vieux d’alors rectifiant la syntaxe aux contrées de la règle, percutant les oreilles de leurs élans de bons sens.

    Un parler,  faut-il le rappeler, pétrit dans cette obligation, que dis-je ce devoir ! d’apprendre la langue de ce pays de France.  Une langue de  terre bien émouvante. Mais « d’où vient ce qui chante » écrit le poète

     

    Et pourquoi écrit-on ? James Sacré s’interroge dans le flux de ses vers   Si j’ai quelque chose à dire,  s’étonnant de savoir Si même c’est de la poésie / tu ne sais pas. Mais il ressent imperceptiblement pourtant que ça remonte de loin et que soudain sur la page,  c’est là !

    d’avoir trimé longtemps, bien t’es content

    Et le lecteur aussi dans ce plaisir partagé !

     

    HM