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  • FRAGMENTS 4 de Gérard Paris

    Gérard Paris,

    Bleu d'Encre Éditions

    Dinant (Belgique),

    coll. la Grande Bleue,

    38 p,

    5 Euros,

    2012.

     

     

     SOUS LE MASQUE

     

     

    Chez Gérard Paris "orpailleur de l'informel, destructeur du concret" une perplexité embrasse l'écriture. Celle-ci va vers l'indicible et l'essentiel. Mais elle connaît tout autant ses limites : "Derrière les masques, la vérité peinte". Tout est là. La vérité n'avance jamais telle quelle, au mieux elle reste "peinte". Comme le rappelle à leur manière les encres de Béatrice Gaudy qui ponctuent le livre.

     

    Celui qui se dit "bègue réprimé" sait ce que les mots peuvent faire et ce qu'ils ne font pas. Poursuivant ses "Fragments" Gérard Paris se rapproche sans cesse de l'aphorisme mais sans tomber dedans. Il refuse en effet le mot pour le mot, le simple jeu d'esprit ou de consonance. Il cultive au contraire les dissonances qui rapprochent d'une vision essentielle : "Vers l'origine : exil de la vie, exil de la mort". Cela dit bien plus que de gros traités philosophiques.

     

    Et tout est du même ordre, un ordre ouvert et fermé, entre désir et chaos, corps et âme, laideur et beauté. Ecce home en quelque sorte. Que demander de plus à un livre où sinon la vérité du moins la justesse se concentre en lanières ?

    JPGP

  • POST IT

    Paul Badin,

    Vincent Rougier Éditeur,

    Soligny La Trappe,

    39 p,

    9 Euros,

    2012.

     

     BADINAGES ET BIEN PLUS

     

    Tout être a besoin d’une vie sensée, d’un croisement harmonieux. Rien de mieux pour cela que le « post it ». On dira que c’est une drôle de manière de communiquer. Mais il arrive que les mots disent ce que la parole ne peut exprimer. D’autant que pour Badin le « post it » engage au dialogue. Pour preuve, un d’entre eux cueilli au hasard :

    « - Pour toi cette rose qui te va bien et dure.

    - le rouge vraiment nous souligne ».

    Badin croise ainsi les messages jusqu’à en dépasser les bords. Ils permettent de réaliser que ce qui n’a d’existence qu’immédiate peut prendre une autre dimension.

     

    Chaque « post it » provoque l’élan au sein d’une autre corporalité mentale et en une étrange volupté faite de distance mais en vue d’un rapprochement. L’émotion et la réflexion y sont induites. Et le « post it » dans sa texture pelliculaire acquiert une densité charnelle. Elle réintègre le mental dans l’organique et fonde l’acte poétique d’une union au cœur même du quotidien de l’amour. En ce sens ce livre devient presque un acte « érotique » de réciprocité puisque qu’il métamorphose la vie de tous les jours en cérémonie.

     

    Le « post-it » tend ainsi un voile éphémère pour enchanter le lieu de vie et pour éviter que la vie à deux tombe en sommeil. Le poète la libère. Le monde le plus familier mérite soudain une autre attention. Tout semble en attente d’être reconnu autrement. L’imagination remplit l’espace du carré collé généralement sur le réfrigérateur. Le monde en palpite et s'y rêve par-delà ses arêtes, ses surfaces, ses apparences.

     

    Le réel tronqué dans sa simple évidence reprend la vibration étrange d’un dialogue amoureux. Son "détour" rouvre à la disposition d’une curiosité de la vie dans le respect de l'un et l’autre des messagers au sein d'une tension toujours énigmatique, mystérieuse, dynamique. Des vérités omises s'aperçoivent. Le geste qui colle le papier est genèse. Il marque le passage du souffle repris et repris. Il est accomplissement de l'espace illimité de l’amour dans la limitation étroite d’une surface minime.

     

    JPGP