MISERERE
Raymond Farina,
Éditions Dumerchez,
Col. « Éclats de Vivre », Liancourt, 62 pages.
Les « Éclats de vivre » de Raymond Farina sont le combat journalier contre l’infléchissement. Un combat transformé en chant puissant qui se prolonge d’une section du livre à l’autre. Il n’est plus question ici d’images ou de descriptions mais de mise à jour d’une problématique existentielle qui rapproche le lecteur de l’auteur et fait du semblable un frère.
Le « piéton halluciné
que ses rares extases
n’ont pu distraire de l’asphalte »
nous ramène à notre « tout petit tas d’os » dans un mouvement d’accélération qui dit tout. Jusqu’à – justement - ce tas que nous deviendrons.
Le problème de la relation reste ici essentiel. Elle n’est pas traitée par-dessus la jambe. C’est pourquoi la parole, quoique fragile ne tremble pas, elle affronte le gouffre existentiel que le quotidien rappelle :
« On ouvre le journal
On le ferme aussitôt
Quel naïf chercherait encore
Une nouvelle fraîche
Dans cet infini nécrologue ? »,
Pour autant le vivant reste essentiel, la beauté aussi. En perdition, toujours, mais toujours essentiels. Comme le Rouault des « Miserere », le poète par les voies qui lui sont propres cherche à embrasser le sens de la vie. Refusant le « je », écrivant à la « non-personne » selon la formule de Benveniste, Farina refuse autant les quincailleries précieuses et sans profondeur que les sentiments en carton-pâte. En ce sens son écriture reste un geste de fondement. Tout ce que l’auteur a vécu demeure très présent mais sans la moindre exhibition narcissique. C’est sans doute pourquoi ce qu’il incise devient un récit existentiel conséquent.
JPGP