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  • Ombre à n dimensions de Stéphane Sangral - Editions Galilée

    Ombre à n dimensions ( Soixante-dix variations autour du je)

    Stéphane Sangral

    Éditions Galilée

    ISBN : 978-2-7186-0902-7

    Février 2014

    120 pages

    11 €                                                                                        par Hervé Martin

     

     

    Je suis qui ? C’est autour de cette question que le livre – le langage - s’enroule comme un lierre accroché à ce « moi » qui fonde la nature de l’être. Et cette première question pose ici comme sujet le « je suis » de celui qui écrit pour rechercher la nature et la quintessence de son être.

    Ressassant la question « qui suis-je » tout au cours du livre, l’auteur l’enferme toujours davantage dans l’hermétisme de son écriture contre tout éclaircissement possible qui pourrait en surgir. Le poète obsédé par cette question, peut-être plus que par la réponse qui pourrait survenir, est happé malgré lui dans sa quête improbable d’une réponse qui dirait clairement le fondement, les raisons et la nature de ce qui le constitue.

    Qui est-il et pourquoi ? Peut-être que l’auteur devrait mieux accepter le mystère de celui qu’il est dans le présent de la vie que de rechercher d’improbables réponses quand « Je suis » rejoint « le rien » dans une vision nihiliste de soi.

    Dans les circonvolutions du langage qui caractérisent cette écriture et qui cherchent à percer par le sens et les mots, l’authentique nature de soi, le poète passe comme par des successions d’espaces virtuels. Hélas chacun de ces nouveaux espaces repousse plus loin encore les réponses espérées.

    À la formule « je suis », succède celle avec « un point » ou encore avec « je cours » dans un ressassement obsessionnel qui ne découvre en fait rien de soi, que ces questions conduisant à l’impasse du recommencement. Tout tourne en boucle sans trouver d’issue. Une forme d’introspection choisie qui n’ouvre pas hélas de porte intérieure. La forme de l’écriture, similaire à celle du livre précédent qui pouvait par l’angle original et sa singularité aiguiser l’intérêt, perd ici dans ce recommencement l’attrait de son mystère.

     

    hm

  • La vie atteinte de Jean-François Mathé - Editions Rougerie

    La vie atteinte

    Jean-François Mathé

    Rougerie éditeur

    ISBN : 978-2-85668-186-2

    Mars 2014

    82 pages

    13 €                                                                                   par  Hervé Martin

     

     

    Le livre est composé de trois parties dans une tentative d’établir un état des lieux de l’intime avant l’entrée dans une nouvelle et ultime période de la vie. Au fil des pages apparaissent ainsi, un bilan sur les décennies passées, une évaluation du présent et des lumières qui persistent et une vision sur l’horizon des jours à venir.

     

    Le ciel, son bleu, l’éblouissement d’un jour dans les premières heures de l’enfance… puis les ombres, les fatigues qu’elles accompagnent et les cendres à venir, La vie atteinte est un livre écrit à l’entrée d’une étape d’une vie d’homme, la dernière. C’est l’occasion d'égrener les moments de joies et d’espérances au regard des regrets, des peines et des désillusions. Pourtant la vie est toujours là, bien vive et présente, mais le poète sait que parfois il est difficile d’en distinguer les bienfaits.

    Nous ne voyons même pas l’épaule du ciel/ à portée de notre main / et le secours qu’elle offre / à ceux qui savent s’arrêter, respirer /dans les saisons des arbres et des hommes.

     

    Cette dernière partie de vie s’accompagne d’un désenchantement progressif et d’un bilan un peu amer quand le temps qui passe amoindrit les passions et leurs intensités. Le poète mêle alors comme indissociables, les lumières et les joies d’un ciel d’azur – la poésie - et semble-t-il, les joies des palpitations de sentiments amoureux.

    Je te regarde / de ce regard qu’on a pour un ciel.

     

    Mais le temps qui travaille à son œuvre de fossoyeur et la fatalité de la vie, défait progressivement les raisons de la joie que la vie apporte. Le poète pourtant ne cesse de rechercher cette lumière d’espérances qui sourit dans les premiers matins des jours.

    J’irai où le veut l’ombre le cœur papillon encore vivant/ battant contre des lampes toujours éteintes. comme éteintes les illusions.

     

    Jean-François Mathé est en quête et recherche au-delà des mots ce qui pourrait faire sens dans le blanc et le silence des pages pour ouvrir des espaces inconnus, parfois insoupçonnés, dont il est porteur en secret de lui-même.

    Toujours, j’ai recherché ce que le blanc des pages/ disait de plus que les mots./

     

    quand simultanément, le poète voit son monde décliner et s'effacer peu à peu dans les jours que ses pas parcourent.

    Tu chantes au seuil de la nuit

     

    Quel est-il ce tutoiement qui parcourt les poèmes du livre ? Adresse-t-il à une compagne ou à la poésie, ce désir et cette énergie de ciel bleu qui l’animent ? Le lecteur que je suis ne peut le dire mais perçoit bien que des similitudes existent entre ces deux compagnes-là.

    Avec les jours qui s’accumulent, sans doute le ciel s’obscurcit-il et ses bleus en sont moins vifs. Mais les éclaircies qui sourdent parfois n’en sont que plus belles pour rehausser cette part d’espérance nécessaire à l’avancée des pas dans les jours. Jean-François Mathé en cherche les signes, les traques pour écrire des poèmes qu’infiltrent par incursions ténues des lumières salutaires.

    Quelqu’un signe un poème/ égal à cette légèreté / puis souffle sur son nom / pour que le poème sans attache, /rejoigne la neige.

     

    Et c’est bien dans le réel contre la poussière des rêves que s’inscrit la quête de Jean-François Mathé.

     

    Mais l’immensité est dans ces yeux qui s’ouvrent / et me mettent au monde /malgré ma vie déjà vécue.

     

    Car la vie jusqu’au bout est porteuse d’avenir !

     

    Inquiète, la main vérifie / que mon sommeil n’est pas la mort,/ que ma vie poursuit son effort / sans savoir  ce qu’il signifie,/.

  • L'Horizon à l'aveugle - Joyce Mansour

    L’Horizon à l’aveugle,

    Joyce Mansour,

    Éditions Derrière le salle de bans

    Rouen,

    10 €.

    par Jean-Paul Gavard-Perret

    Ligne de fuite

     

    Joyce Mansour  fut la poétesse surréaliste par excellence. À cela une raison majeure : les grandes chaleurs lui convenaient et elle se laissait au besoin dévorer par les hommes sans s’en apercevoir. Du moins c’est ce qu’aimait leur laisser croire. « L’horizon à l’aveugle » ne déroge pas à cette règle : l’homme est épris tel qu’il croit prendre. Il est vrai que la poétesse ne lésine pas sur la métaphore sensorielle. L’odeur de son fantassin de passage est « Plus puissante que le mazout dompteur des grands vagues ». Mais la poétesse ne se fait pas la moindre illusion sur l’amour pas plus que sur l’homme qu’elle se revendique elle-même « parfois entre les lignes »

    Celle qui apprit – très tôt - à ne rêver qu’en jouissant reste la poétesse des étranges nuits tièdes aux palpitations de matrice. Rompue par la lente alternative entre l’espoir et la mort elle se plaisait à avancer rongée d’anormalité. Il lui arrivait d’écrire sur le ventre, le visage dans la douceur enfantine du sable de l’orgasme encore moite de sa dernière marée. Se voulant parfois « Marie Culotte » et parfois « Saignée » son écriture dans cet « horizon » en ligne verticale souffle encore pour faire planer bien des oiseaux dans les crânes de ceux qui pataugent au sein de ses fantasmes. La belle indifférente se plaisait à les monter au sautoir pour les émoustiller.

     

    Jean-Paul Gavard-Perret