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Incertain Regard - Page 7

  • LE DIT DES ELFES SYLPHES ONDINS ET AUTRES CREATURES

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     LE DIT DES ELFES SYLPHES  ONDINS ET AUTRES CREATURES

    de Silvaine Arabo

    vient de paraître chez Encres vives

    Numéro 479  de la collection Encres Blanches

    Format A4

    18 pages

    Prix : 6,10€

    Chez Michel Cosem 2 Allée des Allobroges 31770 Colomiers

     

     

    C’est un univers onirique et panthéiste que l’on découvrira dans ce court livre proche des contes de notre enfance et où les éléments de la nature prennent parole. Une parole en quête de beauté et de justice. Quand on connaît l'état du monde d'aujourd'hui, on comprend qu'il  y a urgence à plaider pour que le monde change. C'est du moins ce que j'entends dans ce texte qui pourrait être le livret d’un petit opéra avec ces prises de paroles successives, du marais, de la feuille, du vert, de l'ange... toutes entrecoupées de chœurs qui participent ensemble à l’invention d’un monde. Le texte semble dire qu'il ne faut pas perdre espoir et qu'il faut considérer la nature à travers tous les éléments qui la composent, si l'homme ne veut pas perdre l'essence même de la sienne.

    HM

     

  • L'IVRESSE DES RIMES - LAURENT BOURDELAS

    L’ivresse des rimes – des poètes et du vin ,

    Laurent Bourdelas

    Stock,

    Paris, 160 p

    14 euros

     

     

    Les mots qui ne meurent pas ignorent

    l’éternelle agonie de leurs auteurs

     

     

    Avant que la mort ne le fasse taire le poète a besoin parfois du vin pour l’aider à cuver son murmure. Plaisir ou une contrainte ? Les deux peut-être. D’une ivresse à l’autre il n’y a qu’un pas. Du moins pour certains poètes. Et pas des moindres. Bourdelas en offre des portraits aussi prenants que significatifs. Les romantiques sont présents ayant largement ouvert la voie. Lamartine, Vigny (poètes producteurs autant que consommateurs), mais aussi Gautier, Musset, Hugo. Suivent les poètes maudits de Nerval à Baudelaire, de Mallarmé à Rimbaud. Pour finir : des personnalités plus intempestives tels que celles de Gaston Couté, Cendras, Laforgue, Jammes. Mais le cercle n’est pas clos.

    Certes on pourrait regretter que Bourdelas se soit arrêté en si bon chemin et qu’il ne soit pas allé à proximité de nos contemporains. Il est vrai que cela eût été très délicat. Plus que jamais, dans notre époque de repli moral, boire est un vice. Et après le regretté Yves Martin qui fit « bouillir son vin » il n’y eut plus de voix pour oser faire l’éloge de la dive bouteille et revendiquer ses plaisirs délétères. On exceptera quelques (rares) poètes belges, fameux irréguliers de la langue. Ils sont vivants (et en bonne santé) : on taira leur nom.

    Cela n’est que détail. Reste l’essentiel : au-delà de ses anecdotes qui en font un des piments de choix, le livre de Bourdelas est un texte majeur. D’abord par son ton : ni convenu, ni racoleur. Toujours clair il prouve, contrairement à l’idée désormais reçue, que le vin n’est pas à considérer uniquement d’un côté négatif. Il peut même forcer un certain héroïsme et enlève le découragement à des créateurs. Sans faire l’apologie du vice Bourdelas prouve que le vin ouvre à un monde poétique et à une famille humaine peuplée de perdants magnifiques. Cela n’est pas propre à la France : aux USA comme en Russie le vin n’est pas seulement la piètre consolation des artistes. Ils y vident leur art et leur vie.. « Tout est dans le vin et tout est dans la poésie » écrit Bourdelas. Et de préciser : « l’inspiration, la magie et le mythe, la pensée et la connaissance, la douleur et la consolation, le plaisir, le souvenir et l’oubli, le rêve, la révélation de l’inconscient ». Le problème est que l’usage échappe souvent aux sacrificateurs et qu’il n’existe pas de bonne règle en la matière.

    Les paradis du vin valent en effet ce que valent les autres paradis artificiels. Tout dépend d’ailleurs moins le vin que ses consommateurs. Pour certain la puissance créatrice du vin reste des plus improbable. D’autres y trouvent un divertissement ou l’oubli mais certains y cherchent et y côtoient de plus près la vérité. On retombe ainsi sur la fameuse problématique de Michaux dans « Façons d’éveillés, façons d’endormis ». Mais pour aborder l’histoire des paradis artificiels il faut évacuer d’une par la question morale et de l’autre les idées toutes faites. On peut même penser qu'au-delà d'un certain seuil le vin comme la poésie ne se domine pas. « Enfer ou ciel qu’importe » disait Baudelaire connaisseur en les deux ivresses. Mais c’est là que les lignes se mettent à bouger. Avec le risque que cela suppose.

    Prison ou libération ? La question reste beaucoup plus complexe d’autant que le « bon usage » du vin est comme celui de la grammaire selon Grévisse : il y a des règles mais à chacun d’elle des contre-exemples viennent s’inscrire superbement en faux. Reprocher au vin que ses effets pratiques sont différents des intentions du poète n’aurait aucun sens. L’alcool a ses raisons que la poésie n’ignore pas forcément. Baudelaire, Rimbaud, Mallarmé sont là pour le prouver.

    Bourdelas  fait preuve dans une thématique qui pourrait facilement pousser vers l’excès à une componction remarquable. Il montre comment chez les créateurs le vin peut jouer le rôle  d’antidépresseur et aussi de flamme. Contre les dures lois de l’existence des poètes y ont basculé parfois (rarement...) avec délicatesse. D’autres y sont allés comme à l’encontre de leur envie et presque à leur corps défendant. Mais si morale il y a dans un tel ouvrage on pourrait la résumer ainsi : comme toute flamme celle de l’alcool est belle à regarder. Elle brûle quand on s’en saisit. Le verre certes est d’abord suspendu dans l’air avant de tomber par terre et se casser. C’est parfois le prix à payer pour qu’une voix se fasse entendre et arrive qu’une œuvre se crée. Certaines zones de la réalité comme de la poésie ne peuvent être atteintes que par le dérèglement de l’esprit. C’est pourquoi il peut exister entre le vin et la poésie une sorte d’alliance. Elle peut faire des livres de vin des livres divins. Quant à l’existence de leur créateur c’est une autre affaire.

     

    JPGP.

     

     

  • CAHIER D'IVRY - ANTONIN ARTAUD

    Antonin Artaud, Cahiers d’Ivry tome 1 et 2, Gallimard

    HORS SÉRIE LITTÉRATURE
    TOME I : 1168 pages, ill. - 34,50 €
    TOME II : 1184 pages, ill. - 34,50 €

    Ces deux volumes des Cahiers d’Ivry (tome I, de février à juin 1947 ; tome II, de juin 1947 à mars 1948) constituent la fin des Œuvres.

     

     

    L’INTRODUCTION AU NÉANT

     

    À Ivry Artaud se voue encore à l'aridité du papier afin de courir le risque d'une révélation terrible mais attendue. Les Cahiers finissent donc le travail entamé avec les Cenci.  Il s'agit de débarrasser la matrice de la tache de naissance, des vices de la chair et de l’esclavage qu’elle enclenche.   Comme l'écrit Marcellin Pleynet, grâce aux Cahiers  la "matrice est remise à sa place", elle est lavée -  de (presque) tout soupçon - mais il faut aller encore plus loin. Les Cahiers d’Ivry plient les dernières scènes (tragiques et fulgurantes) du "théâtre généralisé" de l’auteur. Ils sont la véritable introduction au néant.

    Avec les Cahiers d’Ivry  la mort n'est plus tenue à distance. On sent déjà comment la terre aspire l'être dont elle se nourrit jusqu’aux « crachats ». Avec ces ultimes Cahiers Artaud rentre directement en rapport avec les semences immondes qui ne sont les restes et les cendres.  Comme dans les Lettres relatives aux Tarahumaras,  il vit là mais sous un registre totalement opposé une « expérience organique ».  L’expression « la terre qui est mon corps » n’est plus une métaphore. Et celui qui s'écria dans les Tarahumaras : « Je suis retourné à la terre »,  retrouve ici ce  chemin qu’il ne quittera plus.  « Tout est présent en moi sans voyage et sans retour en arrière » écrit celui qui se sentit de toujours pris dans « les mâchoires d'un carcan ». Il n'a plus besoin de faire appel - comme il le tenta - à la prière de Mathieu dans le Nouveau Testament : « Veillez et priez pour ne pas entrer en tentation ». La tabula rasa est dressée. Artaud espère-t-il encore que mourir ne serait pas « tomber au néant mais à raffiner l'être de l'être », comme il l’écrivait dans « Supports et Supplications » ?

    Celui qui affirmait « Je n'ai jamais cherché que le réel » (Nouveaux écrits de Rodez, XX)  se sait  en voie de "perdre la viande"  même s’il ne lui en restait que fort peu. Les Cahiers d’Ivry deviennent le texte testament où l'œuvre  se retourne sur elle-même. Il s’agit tout compte fait d’une l’ultime transgression au crépuscule. Et ce dans le mouvement, le soubresaut au sein d’une superbe solitude et son exigence. Dans ces deux tomes tout se confirme – à savoir tout finit  sauf pour l’œuvre. Son reste est pépite d'une  douleur utérine, affres d'affres des agonies.

    Reste l’attente, l’agonie plus longue que celle d’un Jésus Christ « qui est allé chercher chez les hommes  un utérus dont je n’aurais su que faire ». Le cri remplace le christ et c’est là l’essentiel. Jusqu’au bout l’auteur des Cenci demeure irrécupérable. Et il est a parié que l’ensemble des Cahiers (ils commencent avec le tome XV des Œuvres complètes) resteront la partie la plus génialement forte de l’ensemble du corpus.

    Des Cahiers se libère et se détache «… la dernière petite fibre rouge de la chair » au plus profond de la douleur physique et nerveuse. Même dans sa chambre cellule d’Ivry Artaud griffonne pour soulever l’horizon, attendre de plus en plus schizophréniquement  le creuset d'une nouvelle vie pour une ivresse inconnue, « Pour moi, écrit Artaud, il ne s'agit pas d'entrer mais de sortir des choses ».

    La terre rouge du Mexique est bien loin, reste la poussière d’Ivry, pure histoire de la genèse et du chaos. Au moment de la limite suprême de la précarité de l’existence ou veut rêver l'auteur  capable enfin d’affirmer un  Je  libre et non plus « Arto » ou « Le Momo ».   Mais de fait, perdure le cri de l'esprit qui se retourne contre lui-même. Dépassant les limites habituelles de l’écriture, une fois encore le poète  touche au cruel lyrisme. Il  coupe court à ses effets, ne tolérant pas la chose même à laquelle il donne l'expression la plus sûre et le plus sublime.

     

    JPGP

  • L'ASSOCIATION ARTS RESONANCES

    UNE INFORMATION DE L'ASSOCIATION ARTS RESONANCES:

    Naissance d'un blog : http://arts-resonances.over-blog.com/

    L'association "Arts Résonances" travaille depuis trois ans à la traduction de la poésie contemporaine, du français vers la Langue des Signes Française (LSF) et de la LSF vers le français.

    Le blog est né, encore balbutiant, encore un peu maigre, mais vous pouvez dès maintenant y lire quelques articles et voir des vidéos de lectures traduites, tournées au Festival "Voix Vives" de Sète en juillet 2011.

    Ce n'est que le début d'une aventure qui se poursuit...
     Nous travaillons également à mettre en ligne une traduction en LSF de tous les textes du blog. Ça demandera un petit peu de temps. Soyez patients, on ne vous oublie pas...

    P.S. Grand merci à tous : les interprètes-traducteurs de Des'L, les artistes sourds qui ont travaillé aux traductions, Maïthé Vallès-Bled et l'équipe du festival "Voix Vives", Pierre Garbolino et Video Lupum, les poètes, les comédiens-lecteurs et les techniciens du festival, Elio Possoz, notre webmestre.

    Travail en collaboration avec "Du Pain et Des Roses" à Lyon

    VOIR LES VIDEOS:

    http://arts-resonances.over-blog.com/pages/Videos-5892465.html

  • DES POETES DANS LA NATURE

    Des poètes dans la nature

     

    Depuis 2008, le Parc naturel régional de la Haute Vallée de Chevreuse et la Maison de la Poésie de Saint-Quentin-en-Yvelines ont organisé, chaque année, une résidence d’écriture dans chacune des 3 réserves naturelles du Parc. A chaque fois, deux poètes ont eu comme consigne d’écrire sur et à partir du lieu. Six regards différents rendent aujourd’hui compte de ces espaces préservés.

    Pour découvrir les réserves et ces écrits, publiés en un recueil, participez à des balades à deux voix, naturalistes et poètes mêlant leurs connaissances et leurs mots pour vous révéler ces lieux de nature. Dans le cadre de la 8ème édition de Poésyvelines.

     

    Samedi 1er octobre, Réserve naturelle du Domaine d’Ors à Châteaufort

    10h30 : Lancement du recueil des textes écrits lors des résidences

    11h : visite avec Françoise Martin de l’ADVM ; Sophie Loizeau et Roland Nadaus, poètes

     

    Dimanche 2 octobre : Réserve naturelle Val et Coteau de Saint-Rémy à Saint-Rémy-lès-Chevreuse

    11h : visite avec M. Ménieux, élu, expert en biodiversité en charge de la réserve et Arnaud Bak, mission environnement du Parc ; Lydia Padellec et Hervé Martin, poètes

     

    Dimanche 9 octobre : Réserve naturelle des étangs de Bonnelles à Bonnelles

    11h : visite avec Robert Meunier et Paul Ballongue de Bonnelles Nature ; Pascale Petit et Mario Urbanet, poètes

     

    Réservation obligatoire : 01 30 52 09 09. Plan d’accès envoyé

     

    Exposition de photos d’Adrienne Arth sur les réserves naturelles accompagnées d’extraits de textes

    Samedis et dimanches 1,2 et 8,9 octobre, 11h-19h au Moulin d’Ors (Châteaufort)

    Entrée libre

  • Un entretien autour de Jean-Paul Michel

    Un court débat sur la poésie autour de Jean-Paul Michel.

    http://www.youtube.com/watch?v=8P5h2f6q0PQ&feature=player_embedded

  • RAL,M N°72 - Juin 2011 VIENT DE PARAITRE

     

    Nº 72

    LES POÈTES

    du Chasseur abstrait

    www.ral-m.com

     

    Edito:

     

     

     

    Gilbert BOURSON
    La ré-invention du corps chez Rimbaud

    LIRE la suite sur le site de la revue...

    http://www.artistasalfaix.com/revue/

  • J'en gage le corps - Editions de l'Amandier

    Les éditions de l'Amandier

    J'en gage le corps
    Construit en triptyque, ce recueil d’Hervé Martin explore la perte, la filiation et l’enfance « travaillant le corps ». Ce qui ne parle pas heurte de front la « question de la mort » quand l’expérience du deuil égrène les noms des disparus, « portions de soi/parties comme un membre ». Parents, amis, anonymes engloutis dans le « chambranlement des vies » dont le souvenir réanime des bribes qui balbutient dans « l’hésitement » d’une langue heurtée et trouée de blancs l’impossibilité à « nommer la perte », la « peine qui est là   dans l’arythmie ». Ce sont père et mère que les deux monologues de Sur l’encours des jours font revivre en même temps que se recompose le vers du poème qui tente d’« extraire du passé la racine ». Et se réinvente  la vie de la mère - « j’invente   j’invente/ comme ce jour de Noël/ orangé rouge les oranges/ sanguines ce possible » - tandis que « perce dans sa voix le tendu de la chair » et que l’écriture « tremble » identiquement « des mots » qui racontent la joie, la douleur et les rêves perdus dans l’effacement du souvenir. Et s’interroge le manque du père lointain « l’inaccompli », «ce noyau/ de l’échange perdu » dont ne reste que frêles réminiscences. « Que cherches-tu/dans ce fouillement ? » interroge,  au final, le poète dans Contre la nuit tandis que ce cheminement intérieur, tout d’émotion retenue, qui lie l’enfance à la mort - l’infans qui ne parle pas à ce qui ne parle plus- se clôt sur l’aveu de l’attachement simple « tu les aimes – dis-le ces corps meurtris du temps » élargissant à tous « la main tendue au vide » dans l’expérience commune et simple de nos vies. 
  • LE FOU

    Benoît Lepecq

    Les éditions de l’Amandier

    en partenariat avec La maison de la poésie de Saint Quentin en Yvelines et la Communauté d’agglomération de Saint Quentin en Yvelines.

    Spectacle créé le 24 janvier 2011 à la Maison de la Poésie de Saint Quentin en Yvelines.

     

     

    Le fou, entre les rives du livre et de la scène

     

    Benoît Lepecq avec ce livre intitulé Le fou  paru aux éditions de l’Amandier, met en scène

    un personnage issu d’une lame du Tarot de Marseille, dans un long monologue construit en séquences qui abordent autant de sujets que l’auteur a eu à cœur d’explorer.

     

    Le Fou, ce Bouffon, est ce personnage qui vit à la cour du roi. Il est sous l’attrait de ses oripeaux celui qui a le privilège et le pouvoir de dire au roi ce qu’aucun autre à la cour ne pourrait dire au risque de perdre sa vie. Avec ses pitreries, son humour, son sarcasme et ses mots, le fou dit les paroles que d’autres ne pourraient pas porter :

    « ...Le fou parle/Nous parlons/Ils parlent/Cela parle/Et tout et tous sont en moi/Et je suis tout et tous »

     

    Le livre de Benoît Lepecq est une satire contre la société. Au rythme des différentes parties du livre, les thèmes évoqués se succèdent. L’auteur dans son texte, comme en un réquisitoire s’insurge contre l’usage hypocrite des conventions que la société nous impose. Le fou ici campe le trublion avec sa verve et ses propos sincères  « irriter la langue dans ses derniers retranchements est le défi du poète »

     

    « L’amour maternel/je le connus depuis le talus/Le talus où elle me chia/»

    Avec cet amour maternel à la singulière genèse,  le fou, orphelin d’un père qu’il cherchera toujours n’a plus rien à perdre dans le dénuement  qu’il éprouve. C’est à partir de cet état, cette perception  nihiliste de soi, cette dépossession, que le fou peut transgresser les limites des conventions bien pensantes et polies de la morale publique.

    Nommé aussi le mat comme dans le jeu d’échec, le fou dans l’espoir de convaincre les hommes, dénonce vivement ce qui vient perturber leurs  vies comme la fausseté des conventions,  l’ornière des habitudes... Au-delà de la société, c’est chacun de nous que le texte apostrophe et l’auteur nous rappelle à l’importance essentielle de la réalité : « Nous devons  prioritairement vivre dans la réalité/Et cela suppose se défaire des chimères/»

     

    À de nombreuses reprises dans le livre, certains vers sont riches d’une subtilité entêtante. C’est d’une oreille juste qu’on entend brandir la voix vers le lecteur ou le public, dans une parole inconsolable qui s’élève avec un bouillonnement de révolte.

     

    Sur la scène, pendant près d’une heure les tableaux  se succèdent avec un éclairage des plus dépouillé. La représentation est entrecoupée d’écrans noirs créés par l’extinction des lumières comme autant de levé et de baissé de rideau. Ils rythment dans leur alternance les différents actes qui se succèdent et composent le propos de la pièce. Benoît Lepecq s’impose par sa présence. Sa voix, son timbre, son énergie sont dirigés avec la force de son texte en direction du  public. Il traverse la scène, la parcourt,  s’agenouille, se lève  le visage tourné presque toujours vers le public.  Benoît Lepecq incarne. Les personnages surgissent. Miss Bas-bleus une dévote dame de charité ; un harangueur gérant de notre liberté et le fou portant le monologue tout au long de la représentation. Le texte investit d’autres thèmes encore, comme le goût de possession des choses, Nos propriétés ;  la figure de Dieu décrite comme absente, irréelle, impossible ; l’argent, l’injustice,  la bêtise et l’espoir, qui engage à vivre au plus près de « qui on est », (de qui l’on naît ? )  L’Épilogue achève le livre sur ces vers éloquents : « Avec ton cœur démembré/Constelle . »

     

    Ce texte nous interroge.  Il nous fait rire, parfois même lorsque nous découvrons sous les personnages  nos propres ombres. Nous reconnaissons en ce miroir qu’il  tend vers nos visages, les faiblesses auxquelles nous succombons parfois ou les espoirs par lesquels chaque jour nous avançons. Benoît Lepecq est notre fou. Il s’adresse à la masse de l’opinion populaire que nous composons chacun et nous alerte : « Singer Dieu/quand on est qu’une bête/Les tyrans/Savent s’y employer/Et bien qu’on les renverse/Il y a toujours quelqu’un/pour regretter qu’avant/Quand on avait la dictature au pays/Au moins on n’avait pas la famine ! »

     

    Le fou  tente d’approcher notre vérité. Il rappelle qu’il est de la responsabilité de chacun de peser du bon coté des  hommes pour que le monde que nous voyons à la dérive,  progresse vers de meilleurs augures en regrettant que parfois

    « Le peuple à des tendresses/Pour qui donne le fouet/Puis un baiser »

  • OWANGA (1919-2010)

    Christiane Tricoit

    revue OX n° 248

    Paris, 2011.

     

     

     

    PUISQU’ON EST PARLÉ

     

    Voici le feuillage humain. Et le passage en force pour que la vie ait encore à rendre bien plus qu’un fantôme. Christiane Tricoit lui restitue tout ce qu’elle lui doit. Même si elle peut penser que tout restera toujours à dire. Ce qui est offert dans ce livre n’est pourtant pas rien. Il rappelle le silence tel qu’il fut parfois. Mais un murmure remonte dans toute sa pudeur :

    « Mère, ngwè / mer, mbene

    Plage, ozégé

    Enfance, erumbe

    Insouciante, voya-voya

     

    Malédiction, ozavo

    Tourment, azingo

    Souci, inakina

    Folie, eranya »

    Il faut comprendre que lire ce texte "illustré" par Philippe Clerc revient à retourner en langue mère et non à une traduction. « Owangé » est un véritable travail quasi sonore de recouvrance. Le chant en est déchiré, déchirant face à la crainte d’un dépérissement sale et en souvenir de celle qui fut l’égarée merveilleuse à la souffrance aussi nue que tue.

    Restent les images comme en effacement. Restent les vocables faits d’échos et de résurgences. Afin qu’aucun trait ne soit tiré. Comme si la créatrice retrouvait dans la mère celle qu’elle désespérait de trouver en elle : une femme qui avait fini par refuser toute conversation, par oublier le réel. Et qui perdit le goût des croyances

    Peu à peu tout se réduit au presque dépouillement. Ne restent que les images sourdes. Elles ne retranchent rien. Elles ajoutent de l’organique tout en creusant un vide étrange. Ainsi la mère exilée, par son départ, exile à son tour l’enfant sauvage demeuré orpheline. Elle pouvait être capable de tout, se croît capable de plus rien. Mais se trompe sur ce point. Doit corriger sa focale

    Comme sa mère elle a avancé dans la langue pour débloquer le français en captant la rumeur des mots dans la rigueur d’un certain vide et dans le mutisme des glaces pour épurer le moindre. En ce sens tous les textes de Christiane Tricoit se sont toujours éloignés de la prose afin d’éprouver la voûte sonore des mots.

    Il s’agit désormais d’œuvrer contre la nostalgie et son chaos. L’air est soudain plein de fond. Le vide peut créer le concret même si l’interrogation ne comporte pas de réponse puisqu’elle semble butter sur une fin. Mais il n’y a pas de oui ou de non dans l’écriture de l’auteure. Pas d’images reflets dans sa création. Juste le silence, la disparition, la vie, la résistance. Soudain l’enracinement n’est ni dans le ciel ni dans la terre : l’horizon est bouché :

    « Moi,

    Dans ce bois d’hiver

    Toujours dolente,

    Arbre, egere

    À côté, g’ozamba ».

     

    La limite est une durée. Elle a ses bords d’années comptées. C’est donc aussi une barre. Mais il ne s’agit pas de s’en absenter. Il convient de faire face de débâcle en débâcle. On se souvient alors de la vieille histoire : « ce qui ne tue pas rend plus fort ». Sauf à ceux qui étaient morts avant. Ce qui n’est pas le cas de Christiane Tricoit. Ce qui fut peut-être le cas pour sa mère.

    Au nom de laquelle les dictionnaires ne servent plus. Le vent, le froid : bref le plus compact. Au « Mots puisque vous êtes parlez » d’Artaud, l’auteure aura répondu pour sa mère et non seulement in memoriam. Bruit. Écoute. Écorce. Une fois les larmes (intsoni) partiellement séchées ce ne sera pas l’oubli mais une réverbération qui est reconduite. Reste l’espoir de ce seuil volatil. Trait inachevé, blanc, noir, métisse. Lèvres rouges. Hantise de l’air.

     

     

    JPGP

     

  • VOLUTES

    Jacques Canut,

    Éditions Carnets Confidentiels

    24 p

    Auch, 2011

    Ici et maintenant

     

    Jacques Canut continue d'égrainer le chapelet de ses carnets poétiques du crépuscule. "Volutes" est l'un des plus fort. Le soir y ressemble à une aube car le poète construit une suite de paysages magnétiques : plateaux d'étoiles, horizons de pêchers, oasis poreuse partagent l'air et hantent chaque texte pour faire fusionner la lumière et l'ombre afin que s'échappent des ondes de volupté. Elles s'alanguissent sur des îles océanes ou celles de deux seins qui percent sur une toile de nu ou à travers le "flottement d'un tissu/ Joyeux".

     

    Le poète reste donc cet éternel jeune homme qui se refuse à être revenu de tout. Le monde brille, les mots s'envolent dans des espiègleries. Elles rejettent de sel de la terre comme le vent fait disparaître une feuille morte. À peine si parfois un souvenir grince. Mais il est encore là pour redorer l'espoir :

    "Où es-tu ma fille ?

    Une photo d'il y a trente ans

    gardée au cœur de mon portefeuille

    fait s'extasier des jeunesses

    aussi rayonnantes que tu l'étais

    à cet âge-là.

     

    La main qui tenait ce cliché

    parut si vieille tout à coup".

     

    Dès lors la poésie est mieux qu'une machine à remonter le temps. Elle reste pour l'ici et maintenant. Et même lorsque les lieux se vident progressivement, ils laissent entrer la clarté en son mystère.

     

    JPGP

  • Phloème

    Phloème

     

    Editions de l’Atlantique

    Christopher Lapierre

    Prix : 18 €

     

    L’horreur des humeurs 

     

    Parler d’un grand amour comme d’un « amour viscéral » (p. 76) n’est peut-être pas un lieu commun, plutôt la localisation exacte de la passion dévorante. On aime alors avec son corps et non plus son cœur comme le voulait la plus plate des traditions lyriques. S’étonnera-t-on que la syntaxe soit heurtée ou que le verbe bégaie selon l’injonction de Deleuze ? Il faut « dire qui manque » (p. 5), et c’est d’abord à sa propre syntaxe que cette poésie manque : « Saignée, par les lèvres / Au barbelé de la respiration / Syncope. / Rien, / Au barbelé de la respiration » (p. 14).

    Mais ces saccades rythmiques laissent pourtant filtrer un sens univoque, à ceci près que cette signification et cette expression ne passent pas par un mol épanchement du sujet, ni par l’absentement de ce sujet devant le jeu aléatoire du signifiant, mais par l’assujettissement de la parole à une matière poétique. Bachelard disait de l’écriture littéraire qu’elle était nécessairement enserrée dans la gangue d’un des quatre éléments – air, eau, terre ou feu – et que cette matière poétique était comme l’inconscient matériel de tout poète. Il fallait alors et toujours puiser son inconscient poétique à une matière élémentaire.

    Mais ici, la matière poétique n’est autre que le corps même, et plus précisément la peau, considérée dans ses sécrétions et ses blessures. Christopher Lapierre puise donc dans un inconscient cutané, dermique, épidermique. D’ailleurs, toute nouvelle de soi, tout récit poétique ne vient-il pas d’abord du corps[1] ? Ici, le jeune poète ne nous épargne rien : « pus » (p. 10) et « plaie » (p. 19), « cloque » (p. 31) et « coutures » (p. 19), « pleurs » (p. 10) et « moiteur » (p. 36). Mais de toute façon, comment rester physiquement indemne d’un tel amour ? : « toi et moi s’aimaient comme la lèpre » (p. 14), ouvre assez rapidement le recueil.

    Ces corps qui se conjuguent devraient normalement dessiner un espace intime et rassurant, quelque « préau dedans » (p. 23), quelque cavité « greffée au-dedans » (p. 14). Mais qu’on ne s’y trompe pas, c’est un dedans plus qu’inquiétant, unheimlich ou uncanny. À la différence de Michaux chez qui les espaces dessinaient encore une rondeur rassurante, forclose de toute perturbation, l’intériorité ici dessinée suggère bientôt la régression ou l’involution dirait encore Deleuze : « écoute-moi inguérir » (p. 21) demande l’amant, qui constate les multiples tentatives « innervées » (p. 12), puis regarde les yeux de l’aimée « qui s’invoyagent » (p. 22). « Ô insurmonte-moi » (p. 28), finit par implorer le poète, et la relation se fait alors « instase » (p. 24) ou « rivière instatique » (p. 24).

    Fallait-il des eaux salvatrices pour cautériser ces plaies ? Eaux-fortes, eaux vierges ou eaux-de-vie, qui enfin ex-haussent, fluidifient le mètre et nous épargnent l’horreur des humeurs. La vie redeviendra-t-elle « jaillissement » (p. 73) et « éclosion » (p. 77) ? Mais finissons par le milieu : « L’amour, l’amour. Je n’ai pas trouvé ta forme, mais je t’aime » (p. 57).

    Alexis CARTONNET

     



    [1] Christopher Lapierre, entretien avec l’auteur. Le prochain recueil contiendra d’ailleurs une section intitulée « Nouvelles du corps ».

  • Lecture du recueil "Poètes pour Haïti" le 12 janvier 2011

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    Une information du collectif Poètes pour Haïti:

    "Le recueil Poètes pour Haïti est publié chez L'Harmattan ! Une soirée de lancement avec lectures et dédicaces aura lieu à la date commémorative de 12 janvier 2011, à partir de 19h30, à l'Espace Le Scribe - L'Harmattan (19, rue Frédéric Sauton, Paris 5ème, M° Maubert-Mutualité)."

    Venez nombreux!

     

     

    Le site du collectif:

    http://haiti2010-secourspoetique.net/

  • La Revue d'Art et de littérature, musique

     

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